Basse-Terre, le 05 Mai 2017
Objet : L'avenir de la psychiatrie en Guadeloupe.
Monsieur le Directeur,
Depuis les Mardi 11 et Mercredi 12 Avril 2017, dates où Maitres Alexandre RIQUIER et Bernard FROMENT ont rencontré les partenaires sociaux à votre invitation, nos deux organisations syndicales sont encore plus inquiètes et s’interrogent encore plus fortement. En effet, selon l’information principale de cette rencontre, le projet EPSM semble souffrir d’un risque juridique au regard du caractère de Région monodépartementale de la Guadeloupe.
Aussi, ce cabinet d’avocats, qui s’est présenté comme votre conseil, affirme que pour faire avancer la restructuration de la psychiatrie en Guadeloupe, sans prendre le risque d’une contestation juridique, le plus simple serait de revenir à l’idée de départ de 2015 : un transfert de l’activité de psychiatrie du CHU vers le Centre Hospitalier de Monteran.
Quoique dubitatifs sur l’intérêt que pourrait porter qui que ce soit pour une telle contestation, nous prenons acte que le projet d'EPSM est toujours aussi incertain, tant dans sa forme que dans son calendrier. Inconnu dans sa forme juridique, donc dans son processus de constitution, confus dans son pilotage, opaque quant aux moyens ou aux instances dont il disposera, l'EPSM apparaît de plus en plus comme une chimère.
Nous nous interrogeons sur la volonté ou non de donner à la psychiatrie en Guadeloupe, les moyens (structurels, financiers et humains) pour offrir une égalité d'accès à des soins de qualité aux guadeloupéens et répondre à des besoins qui ne cessent d'augmenter, au vu des grandes problématiques sociales.
La réalité actuelle montre au contraire que, loin de progresser, la santé mentale est en régression : croissance des soins sans consentement, diminution des effectifs soignants, disparition des psychiatres, conditions d'accueil indignes (toujours pas de chambres de soins intensifs disponibles au CHU à ce jour !). Nous ne croyons pas que la forme juridique de l'EPSM soit de nature à améliorer cette situation catastrophique, voire dangereuse.
Et maintenant, après d'incessantes tergiversations des Directions des deux établissements, voilà que l’ARS est dans l’hésitation à huit mois de la date butoir de la création de cet outil. D'autant que nous notons le passage au prochain CSOS du renouvellement de l’autorisation de psychiatrie du CHU, signifiant une volonté de prolonger la situation actuelle.
Nous avons soutenu le projet de création d'un EPSM, pivot de la mise en oeuvre d'un Projet Territorial de Santé Mentale (PTSM) concerté. Nous ne concevions pas cet outil comme une panacée mais nous estimions que c’était, et cela reste, un bon moyen et une bonne occasion pour que la prise en charge de la santé mentale en Guadeloupe soit à la hauteur des besoins de la population. Nous avons eu l’occasion de fixer nos conditions pour la réussite de ce projet : améliorer le dispositif de soins psychiatrique en Guadeloupe en général, et en Grande-Terre en particulier, sans dépouiller le CHM de moyens financiers et humains déjà insuffisants, et sans diminuer les effectifs soignants à cause des surcoûts du projet.
De surcroît et, sur le plan technique, l’option de la création d'un EPSM a l’avantage :
- De répondre clairement à la question de la nouvelle représentation du personnel puisqu’il s’agira d’un nouvel établissement (nouvelles élections, nouvel accord local…),
- De structurer une nouvelle Direction territoriale capable de porter un nouveau projet d'établissement déclinant le PTSM en concertation avec des instances légitimes
- D'éviter des juxtapositions hétérogènes ou des solutions imposées de façon précipitée, pour une approche plus cohérente, seule capable de répondre de manière efficiente à des problématiques et enjeux globaux.
Nous estimons, à ce stade et après deux années d'implication des personnels et de travaux très avancés malgré les freins, qu’il est temps de clarifier les choses afin de se fixer, une fois pour toute, une direction claire, un objectif et des moyens maîtrisés.
Pour cela, nous exigeons l’ouverture de négociations tripartites (ARS, Hôpitaux, Organisations Syndicales) sans attendre le retour des conclusions du cabinet d’avocats.
Ce projet, quelle qu'en soit la forme juridique, ne peut réussir sans notre adhésion, qui doit se traduire par la signature d'un accord actant un vrai projet de psychiatrie en Guadeloupe. Cet accord doit, notamment, préciser les mesures sociales permettant d'harmoniser la situation des personnels, ainsi que les moyens financiers et humains nécessaires au fonctionnement de l'EPSM, incluant la mise à niveau des services de Grande-Terre et les surcoûts liés au fonctionnement sur plusieurs sites. En ce qui concerne les effectifs des services cliniques, ils ne sauraient être inférieurs aux effectifs minimum qui avaient été négociés et financés à l'occasion des plans régionaux précédents, soit 60 postes de psychiatres, et 720 postes de personnels non médicaux.
Dans l’attente d'une date de première réunion, nous vous adressons, Monsieur le Directeur général, nos salutations distinguées.
Pour la FSAS-CGTG, BELAIR Philippe
Pour le SPH, J. PAQUIS
Copies : Aux Directeur et Président de CME du CHU et CHM, aux personnels du CHU et du CHM, à la DGOS, à la Presse.