Haro sur les fonctionnaires ! A l’automne dernier, la primaire de la droite avait tourné au concours de celui qui proposerait de supprimer le plus d’emplois publics. Hier encore, lors du débat entre les onze candidats à la présidentielle organisé par BFMTV, le sort des agents de la fonction publique a été au centre des joutes oratoires. Même au-delà de l’arène politique, l’idée domine largement aujourd’hui les débats que les employés du secteur public seraient un fardeau qui empêcherait le secteur privé, seul véritable créateur de richesses et d’emplois, de se développer. Cette vision a toujours été fausse, mais elle le devient de plus en plus.
Nécessaires aux entreprises
Aucune entreprise privée ne peut en effet produire de richesses avec succès si elle ne trouve pas dans son environnement immédiat des personnes bien formées, qui soient en bonne santé et soignées correctement si elles tombent malades, qui trouvent à se loger à des prix abordables dans un environnement suffisamment agréable, qui puissent se déplacer aisément, qui se sentent suffisamment sécurisées pour l’avenir pour se concentrer à 100 % sur leurs tâches... Il faut aussi à toute entreprise une justice qui fonctionne vite et bien pour régler ses litiges éventuels, ainsi que la certitude de disposer en permanence de courant électrique, d’accès à Internet...
Le débat devrait porter sur l’efficacité de l’action publique plutôt que sur le nombre de fonctionnaires
Bref, les entreprises ont absolument besoin de « biens publics » de qualité pour prospérer. Et ces biens publics, on ne sait les produire que par une action publique mise en oeuvre le plus souvent par des employés du secteur public. Au fur et à mesure que la division du travail s’approfondit et que des personnes et des organisations plus nombreuses interviennent pour la production du moindre bien ou service, les entreprises ont même de plus en plus besoin de ces fameux biens publics : une organisation économique aussi sophistiquée nécessite en effet un environnement de plus en plus stable, prévisible, optimisé...
Besoins
Cela ne signifie évidemment pas que « plus il y a de fonctionnaires, mieux c’est ». Encore faut-il que l’action de ces employés du secteur public corresponde aux besoins réels de la société. Et sur ce plan, en France, nous avons à coup sûr d’importants progrès à réaliser, si on en juge par exemple par les résultats très insatisfaisants de l’école publique en matière de lutte contre les inégalités ou encore par les déséquilibres territoriaux persistants. C’est bien davantage sur cette question de l’efficacité de l’action publique que le débat devrait se concentrer, plutôt que sur celle du nombre de fonctionnaires. Cette recherche d’une meilleure efficacité du secteur public implique qu’on s’interroge sur les statuts, les modes de recrutement et de rémunération ou encore la gestion des carrières des employés du public. Ils sont souvent très différents dans d’autres pays et nous aurions certainement des leçons à tirer de l’expérience de nos voisins, même si, bien entendu, la gestion des emplois publics doit s’inscrire dans l’histoire singulière de chaque pay
1/ Y A-T-IL DE PLUS EN PLUS DE FONCTIONNAIRES EN FRANCE ?
Sous son apparente unité, la fonction publique recouvre en réalité trois entités distinctes. La fonction publique d’Etat regroupe les agents des ministères et ceux des établissements publics administratifs (Pôle emploi, CNRS, Musée du Louvre...). La fonction publique territoriale rassemble, elle, le personnel des collectivités locales (régions, départements, communes), ainsi que celui des établissements publics administratifs locaux. Relève, enfin, de la fonction publique hospitalière le personnel des hôpitaux publics, des établissements publics d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et des établissements médico-sociaux (aide sociale à l’enfance, par exemple). Fin 2014, la fonction publique dans son ensemble employait 5,4 millions de personnes, hors contrats aidés, soit 20 % de l’emploi total.
Fin 2014, la fonction publique dans son ensemble employait 5,4 millions de personnes, hors contrats aidés (voir ci-après), soit 20 % de l’emploi total. C’est 220 000 agents de plus qu’en 2004, mais la population française a augmenté, elle aussi, de 3,8 millions dans le même temps. Sur cette période, la fonction publique d’Etat (44 % des effectifs globaux), a perdu plus de 250 000 postes. Cela s’explique en partie par le transfert, entre 2006 et 2010, de 135 000 agents vers les collectivités territoriales, suite aux lois de 2004 sur la décentralisation (personnel d’accueil, de restauration et d’hébergement des collèges et lycées, personnel des anciennes Directions départementales de l’équipement). La politique de non-renouvellement d’un retraité sur deux, appliquées de 2007 à 2012 dans la fonction publique d’Etat et la baisse des budgets des ministères ont également contribué à faire diminuer les effectifs.
Hausse dans les collectivités
A l’inverse, les effectifs de la fonction publique territoriale ont fortement augmenté , et ceux de la fonction publique hospitalière plus modérément. Dans cette dernière branche, ce sont les effectifs des Ehpad, structures en fort développement, qui se sont particulièrement accrus : + 3,1 % par an en moyenne. Il n’en reste pas moins que, dans leur ensemble, les effectifs de la fonction publique n’ont pas évolué plus vite que l’emploi total.
Evolution des effectifs de la fonction publique comparée à celle de l’emploi total, en %
Inversement, le fait que le nombre de fonctionnaires statutaires augmente ne veut pas nécessairement dire que les effectifs totaux augmentent. En 2014 par exemple, environ 78 000 fonctionnaires statutaires sont entrés dans la fonction publique et 150 000 en sont sortis. Pourtant le nombre total de fonctionnaires statutaires a augmenté de 26 000 cette année-là par rapport à 2013. Pourquoi ? Parce qu’en 2014 (comme d’ailleurs en 2013), un peu moins de 100 000 contractuels, déjà présents dans les effectifs de l’emploi public, ont été titularisés en application des plans de résorption de la précarité dans la fonction publique (loi Sauvadet de 2012). Des subtilités qu’ont rarement en tête ceux qui dénoncent le « toujours plus de fonctionnaires ».
Xavier Molénat
2/ LA FRANCE COMPTE-T-ELLE PLUS DE FONCTIONNAIRES QUE LES AUTRES PAYS D’EUROPE ?
Les autres grands pays industrialisés ont-ils besoin de moins d’agents publics qu’en France pour offrir les mêmes services ? La réponse est clairement négative. Afin d’effectuer cette comparaison, on peut commencer par ramener le nombre de fonctionnaires au nombre d’habitants. En effet, lorsque les partisans de la baisse de 500 000 agents mettent en avant l’idée que l’on reviendrait alors au niveau de l’année 2000 (pas franchement une France de déserts des services publics), ils oublient qu’entre 2000 et 2016, nous avons gagné 6 millions d’habitants. Et que l’accroissement régulier de notre démographie réclamera, a priori, plus d’emplois et d’investissements publics, pas moins ! Le périmètre de mesure du nombre de fonctionnaires n’est pas identique d’un pays à l’autre.
Ramené à la population, l’emploi public français se situe aujourd’hui dans la moyenne haute des pays de l’OCDE avec 86 personnes pour 1 000 habitants. C’est loin derrière les pays nordiques (Suède, Finlande, Danemark), mais c’est plus que le Portugal (68) et bien plus que l’Allemagne (60).
Pas de surpoids français
Mais cette comparaison est biaisée par le fait que le périmètre de mesure du nombre de fonctionnaires n’est pas identique d’un pays à l’autre. Par exemple, tandis que les jeunes Allemands commencent l’école à 6 ans, c’est 3 ans en France, ce qui implique forcément plus d’enseignants. Et les personnels des hôpitaux allemands, bien que financés par l’argent public, ne sont pas comptabilisés dans les effectifs de la fonction publique, etc. Si l’on regarde de près les chiffres sur l’éducation, notre pays semble avoir fait « le choix délibéré de dépenser moins pour éduquer moins ».C’est pourquoi Xavier Timbeau, directeur principal à l’OFCE, propose de comparer le nombre total de personnes offrant des services non marchands (santé, éducation et administrations), toujours ramené au nombre d’habitants. Les pays nordiques ressortent encore largement en tête. La France se situe au même niveau que les autres grands pays industrialisés et même derrière les Etats-Unis. Ce qui n’est pas forcément une bonne nouvelle. Par exemple, si l’on regarde de près les chiffres sur l’éducation, notre pays semble avoir fait « le choix délibéré de dépenser moins pour éduquer moins », souligne Xavier Timbeau.
Christian Chavagneux
3/ LES FONCTIONNAIRES SONT-ILS MIEUX PROTÉGÉS QUE LES SALARIÉS DU PRIVÉ ?
Qui dit fonction publique suggère emploi à vie. Les fonctionnaires bénéficiant d’un tel statut sont cependant loin d’être les seuls agents publics : ils représentent 72 % de ces effectifs. 17 % sont des contractuels soumis à un régime dérogatoire de droit public, 4 % sont en contrats aidés et 7 % ont un statut encore différent (médecins hospitaliers, enseignants et documentalistes des établissements privés sous contrat). En 2013, les contractuels ont représenté 54 % des embauches et les emplois aidés 23 %.
A côté du stock, les flux donnent à voir un autre visage de l’emploi public : en 2013 (dernière année dont les chiffres sont disponibles), les contractuels ont représenté 54 % des embauches et les emplois aidés 23 %. Le reste se répartissant entre 16 % de fonctionnaires et 7 % de personnels sous un autre statut. Les personnels non statutaires ont toujours existé dans la fonction publique mais, depuis le début des années 2000, le nombre d’établissements qui fonctionnent comme des agences de l’Etat sur le modèle anglo-saxon a crû fortement. Leurs modalités de gestion leur permettent de recruter plus aisément de nombreux contractuels, notamment dans l’enseignement supérieur et la recherche (les universités depuis la loi LRU), la culture ou la santé (agences régionales de santé).
Tensions avec le public
Certes, parmi les non-fonctionnaires, tous ne sont pas précaires : les médecins des hôpitaux publics ou les enseignants du privé le sont rarement. Mais comme dans le privé, la précarité se conjugue surtout au féminin et rime avec temps partiel. Dans la fonction publique territoriale, les femmes représentent 61 % des agents, mais 68 % des contractuels. Les plans de résorption de la précarité n’ont pas remédié à cette situation. Depuis 2005, une réforme limite certes à six ans la durée maximale d’un CDD, mais les employeurs publics s’arrangent le plus souvent pour ne pas la franchir. Et cette limite reste très supérieure à ce qu’elle est dans le privé : un CDD ne peut y être renouvelé que deux fois dans une limite de dix-huit mois. La garantie de l’emploi ne prémunit pas contre de mauvaises conditions de travail.
Quant aux titulaires, une fois entrés dans la fonction publique, ils en sont en effet rarement exclus : sur les 3 200 sanctions disciplinaires prises en 2015, on n’a décompté qu’une centaine de révocations (l’équivalent d’un licenciement pour faute lourde). Cette garantie de l’emploi ne prémunit cependant pas contre de mauvaises conditions de travail. Les contraintes physiques sont certes moins fortes dans la fonction publique d’Etat que dans le privé, mais ce n’est pas le cas dans la territoriale, et surtout dans la fonction publique hospitalière, qui subit de plus massivement des horaires de travail atypiques. Les fonctionnaires travaillent dans l’ensemble plus souvent le dimanche et la nuit que les salariés du privé. Ils se plaignent aussi davantage de manquer d’informations claires sur leurs tâches ou d’être jugés par des personnes qui connaissent mal leur travail. Ils sont aussi et surtout beaucoup plus souvent confrontés à des situations de tension avec le public. L’affectation des fonctionnaires ne tient pas non plus toujours compte de leur situation personnelle. De plus, l’emploi à vie est assorti de contraintes en matière de liberté d’expression ou de droit de grève pour les militaires.
Céline Mouzon
4/ LES COLLECTIVITÉS LOCALES ONT-ELLES FAIT EXPLOSER LE NOMBRE DE FONCTIONNAIRES ?
Employés dans les communes, communautés de communes, départements, régions et quelques autres structures publiques locales, les fonctionnaires territoriaux sont presque deux millions, soit un gros tiers de la fonction publique. Est-ce trop ?
La Cour des comptes tranche régulièrement le débat en accusant les collectivités d’avoir exagérément recruté. De 2002 à 2013, les effectifs de la fonction publique territoriale ont en effet augmenté de 27,5 %, soit 405 000 agents supplémentaires. Cette forte hausse s’explique certes par le fait que l’Etat a transféré des compétences aux collectivités territoriales dans le cadre de la décentralisation. Mais comme l’explique la Cour, l’argument ne tient qu’en partie. Sur les 405 000 agents supplémentaires, 243 000 l’ont été dans les communes et les intercommunalités, alors qu’elles n’ont pas reçu de nouvelles compétences.
L’emploi à la hausse surtout en régions
De même, le rythme annuel d’embauches a certes été beaucoup plus faible dans les communes (+ 0,9 % par an) que dans les départements (+ 4,7 %) et les régions (+ 18,8 %), mais il reste supérieur à la croissance de la population française (+ 0,6 %). Et il aurait logiquement dû être plus limité dans la mesure où les communes se sont regroupées en communauté de communes, qui ont elles aussi beaucoup embauché (+ 7,2 %) pour fournir les services transférés au niveau intercommunal (collecte des déchets, petite enfance...). +7900 nouveaux emplois dans les communes en 2014 du seul fait de la réforme des rythmes scolaire.
Assiste-t-on donc à une dérive incontrôlée de l’emploi dans les collectivités locales ? Il faut y regarder dans le détail. En 2014 par exemple, l’emploi dans les communes a augmenté de 7 900 postes. Mais c’est uniquement le fait de la réforme des rythmes scolaires. Sans elle, le nombre d’agents y aurait baissé au contraire de 1 400 postes. Les réformes décidées au niveau de l’Etat peuvent aussi jouer sans qu’il y ait transfert de compétences formel.
Temps partiel
Autre limite : le développement du temps partiel. En 2014, le nombre d’agents de la ville du Creusot par exemple, a augmenté de 26 %. Mais ramenée en "équivalent temps plein annuel travaillé", cette hausse n’est plus que de 8 %. La fonction publique territoriale est en effet celle où les postes sont le plus souvent à temps partiel et précaires : en 2009, 20 % de ses agents n’étaient pas titulaires, contre moins de 14 % dans les autres fonctions publiques1.
Pour ces raisons, l’évolution des dépenses de personnel est un indicateur plus pertinent que celle du nombre de postes. Elles ont cependant elles aussi augmenté assez rapidement, de 3 % par an de 2009 à 2014, contre 1,1 % pour l’Etat central, et 2,2 % pour les administrations de sécurité sociale. Il y a sans doute eu en effet une certaine dérive des effectifs au niveau du bloc communal. Philippe Laurent, maire UDI de Sceaux et président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, nuance cependant : "L’approche comptable de la Cour des comptes est utile, mais il faut aussi regarder les services qui sont rendus en face.Ces trente dernières années, les collectivités ont notablement élargi la palette des services rendus à la population, notamment en matière de crèches et de centres de loisirs, permettant ainsi l’entrée rapide des femmes sur le marché du travail."
Vincent Grimault
5/ LES FONCTIONNAIRES SONT-ILS MIEUX PAYÉS QUE LES SALARIÉS DU PRIVÉ ?
A question simple, réponse malaisée. Si on compare l’éventail des salaires nets, ceux du secteur public sont plus élevés à quasiment tous les niveaux : en 2014, le salaire médian était de 1 957 euros par mois, contre 1 783 euros dans le privé. Pour les 10 % des salaires les plus élevés, les salaires du privé sont cependant supérieurs à 3 609 euros, contre 3 228 euros dans le public. Le public compte une proportion plus grande de cadres et les agents y sont globalement plus âgés.
La comparaison globale n’a cependant pas grand sens, car la structure des emplois n’est pas la même dans les deux secteurs. Le public compte en particulier une proportion plus grande de cadres et les agents y sont globalement plus âgés. Deux caractéristiques qui expliquent l’essentiel des écarts salariaux. Les employés de l’Etat central sont certes mieux payés que ceux du privé mais ce n’est pas le cas dans la territoriale ni dans les hôpitaux. Quant aux cadres du public ils sont nettement moins bien payés que ceux du privé surtout au niveau de l’Etat central.
Le gel du point d’indice* entre 2010 et 2016 a entraîné une stagnation de la rémunération des fonctionnaires au cours des dernières années : leurs salaires ont augmenté moins vite que l’inflation entre 2006 et 2015. Une garantie individuelle du pouvoir d’achat (Gipa) a certes été mise en place en 2008 pour combler l’écart entre l’évolution du traitement indiciaire et l’inflation sur les quatre années précédentes. Mais elle n’est versée qu’à 150 000 personnes environ dans chacune des branches de la fonction publique.
Stagnation
Malgré toutes ces mesures, le salaire annuel moyen du secteur public, en euros constants, était identique en 2014 à ce qu’il était en 2002 : 22 410 euros, alors qu’il a augmenté de 6,5 % dans le secteur privé sur la même période. Les bas salaires ont certes été revalorisés (indexation du minimum de traitement sur le Smic), mais ils ne progressent désormais que très lentement. Et le resserrement des écarts en début de carrière, du fait de cette revalorisation, produit un sentiment de déclassement chez les plus qualifiés. La valeur du point d’indice va cependant augmenter de 0,6 % en février 2017, après une hausse d’autant en juillet dernier. Après six ans de blocage, pas de quoi pavoiser pour autant.
X.M.
6/ LES FONCTIONNAIRES TRAVAILLENT-ILS MOINS ET MOINS LONGTEMPS ?
Eternels tire-au-flanc les fonctionnaires ? Sur le papier, ils doivent effectuer 35 heures hebdomadaires, comme dans le privé, soit 1 607 heures par an. Mais un récent rapport de Philippe Laurent, maire UDI de Sceaux et président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, pointe que les agents ne réalisent en moyenne que 1 584 heures par an, soit 1,4 % de moins que la durée réglementaire. La différence s’explique surtout, selon le rapport, par les astreintes et des horaires plus souvent atypiques que dans le privé. Près de 37 % des fonctionnaires travaillent de nuit, contre 26 % des salariés du privé, et 18 % des agents travaillent le dimanche, contre 15 % dans le privé. Les compensations pour faire tourner certains services jour et nuit prennent plus souvent la forme de temps de travail en moins que d’une rémunération supplémentaire.
Distorsions
Par ailleurs, au-delà des strictes moyennes horaires hebdomadaires (la majorité des agents a choisi de travailler 38 heures 30 avec des jours de RTT), il existe des distorsions entre les différentes administrations. Ces écarts résultent de la mise en place des 35 heures dans une certaine précipitation et d’une "faiblesse du management public" qui n’a pas profité de l’occasion pour revoir l’organisation du travail, note le rapport. Comme dans le privé, certains fonctionnaires connaissent des horaires à rallonge, connectés à leurs outils numériques.
La possibilité de conserver à cette occasion certains usages antérieurs (jours de congés supplémentaires), voire de maintenir des régimes plus favorables que les 35 heures dans certains métiers de la fonction publique territoriale, ont créé des inégalités entre services. Comme dans le privé, certains fonctionnaires connaissent des horaires à rallonge, connectés à leurs outils numériques. Sous la pression du management, ces heures supplémentaires ne sont cependant pas toutes déclarées et l’intensification du travail n’épargne pas les agents. La proportion des employés administratifs dont le poste exige une réponse immédiate à un usager a doublé en vingt ans, analyse la statisticienne Danièle Guillemot.
In fine, les fonctionnaires pas mieux lotis
Qu’en est-il en matière de retraite ? Un agent classé en catégorie "active", dont les tâches présentent un risque ou une fatigue exceptionnelle, peut faire valoir plus tôt ses droits à la retraite (52 ans pour un policier, 57 pour une infirmière). En 2013, un fonctionnaire sur cinq partant en retraite faisait partie de ces catégories. Certains agents bénéficiant de régimes spéciaux (SNCF, RATP...) peuvent eux aussi partir plus tôt que les salariés du privé. Mais pour la majorité des autres agents publics, les règles ont été alignées sur celles du privé depuis la réforme des retraites de 2010, qui fixe l’âge de départ à 62 ans à partir de la génération 1955.
Dans le secteur privé, les 25 meilleures années de carrière sont prises en compte pour le calcul de la pension. Les fonctionnaires bénéficient en théorie d’un mode de calcul plus avantageux, basé sur les six derniers mois d’activité. Pour autant, in fine, ces derniers ne sont pas mieux lotis, du fait notamment de la faible prise en compte des primes dans ce calcul. Selon le Conseil d’orientation des retraites, si on appliquait les règles du privé aux fonctionnaires (majoration de deux années par enfant contre une seule dans le public par exemple), plus de la moitié des agents nés en 1958 y gagneraient.
S.F.
Effectifs, statut, temps de travail..., tour d'horizon des sujets qui font polémique à propos des salariés du public en France.