La FSAS-CGTG, depuis tantôt, n'a eu de cesse de dénoncer les politiques publiques qui visent à réduire les moyens humains - structurels et matériels concernant le sanitaire et l'action sociale. L'incendie du 28 Novembre dernier au C.H.U. de la Guadeloupe met l'accent sur la nécessité de ne pas appliquer, en Guadeloupe, la politique nationale qui conduit à réduire ou mutualiser les moyens sus cités. La FSAS-CGTG rappelle qu'elle s'est toujours prononcée :
- Pour la construction d'un nouveau CHU répondant aux réalités objectives de la Guadeloupe.
- Pour la prise en compte du caractère particulier de la Guadeloupe, Archipel à risques multiples : Séismes, volcanisme, cyclone, submersion.
- Pour la prise en compte de l'évolution de la population et des problématiques sanitaires.
- Contre les GHT même si, la loi s'imposant, la FSAS-CGTG a préféré trois GHT en lieu et place d'un seul au nom du principe de précaution : "Ne pas mettre nos œufs dans un seul panier".
LES AVERTISSEMENTS, EN AMONT, DE LA FSAS-CGTG.
Déjà, dès Juillet 2014 et par lettre ouverte adressée à l'ancienne Ministre de la Santé - Marisol TOURAINE, nous l'alertions sur les dégâts annoncés de l'application de la loi HPST en Guadeloupe. Nous soulignions, en argumentation contre la Direction commune des deux Centre Hospitaliers de la Côte-sous-le-vent, qu'un rapport du BRGM (Janvier 2012) attirait l'attention sur le caractère sécuritaire de cet espace géographique de l'ile en cas de repli sanitaire post catastrophes - naturels ou non.
Nous lui avons rappeler cette évidence, lors d'une autre lettre ouverte datant du 24 Février 2016 lors de son passage en Guadeloupe, où nous prenions position contre les G.H.T. estimant devoir éviter que la Guadeloupe centralise de trop sa prise en charge sanitaire, alors même que nous subissons une réalité archipélagique avec risques divers et majeurs.
De même, nous nous opposions à la Direction commune entre le CHGR et le CHU puisque nous estimons que c'est mettre en péril le projet de création d'un vrai secteur gérontologique et gériatrique en Guadeloupe. Notre analyse repose sur le fait que l'Etat peut parfaitement se désengager partiellement dans le financement du nouveau C.H.U au motif que - puisqu'il n'y a pas d'argent dans les caisses - une partie (si ce n'est la totalité) des bâtiments du nouveau CHGR (Palais-Royal) peut répondre à la situation. Dans un communiqué de presse, en date du 18 Juillet 2016 - suite à la décision de l'ARS sur la création des GHT en Guadeloupe, nous exprimions notre inquiétude sur.
- Le caractère provisoire (Dixit l'A.R.S.) de cette décision alors que la loi prévoit qu'il revient aux établissements de conventionner pour une décennie et de pouvoir réviser les conventions (et non changer de conventions) lors de l'évolution du P.R.S..
- La volonté manifeste (de l'ARS) d'imposer une Direction commune entre le C.H.U. et le C.H.G.R., voie royale vers la fusion entre ces deux établissements et la disparition de la gérontologie et de la gériatrie en Guadeloupe de par leur dissolution dans la masse des autres disciplines. Cette discipline est nouvelle et réponds aux grandes problématiques de vieillissement de la population Guadeloupéenne de demain et même déjà d'aujourd'hui.
- De la volonté manifeste de tendre vers un G.H.T. Unique qui accélèrera la destruction de la santé publique en Guadeloupe de par une superstructure phagocytante et inefficiente sur tout le territoire. Un tel choix du public ne pourrais, d'ailleurs, qu'être utile au privé qui saura tirer profit de cette inefficience.
LA POLITIQUE SANITAIRE EN COURS.
Nous avons exposé notre désaccord, dans une lettre ouverte à M. le Président de la République datant du 20 Septembre 2017, avec cette politique sanitaire qui ne répond à aucune logique sanitaire mais à une unique logique strictement comptable. Cette adresse faisait suite aux deux ouragans majeurs que nous avons essuyé dans la zone : Irma et Maria. Nous mettions l'accent sur " ... l'hésitation à informer et mobiliser la population comme cela se faisait par le passé. Cette hésitation donne à penser que ce qui compte le plus c'est la vie des entreprises qui ne doivent perdre une once de journée de travail tout en mettant en danger des vies humaines qui se retrouvent, en pleine vigilance rouge, sur le chemin du retour à leur domicile sans avoir eu le temps de se préparer psychiquement et matériellement...".
Nous synthétisions le choix politique actuel par "Des lois diverses sont votées pour "réformer" la France mettant en grande difficultés les travailleurs, singulièrement les professionnels du Social, du Médicosocial et de la santé, sensés s'occuper de personnes en difficultés. Cela créé un contexte anxiogène renforcé par vos ordonnances à venir donnant plein pouvoir au patronat pour casser toute résistance à l'idéologie prétendument "indépassable" qu'est le néolibéralisme...".
Que se passe-t-il vraiment ? Depuis une trentaine d'années, comme dans tous les secteurs publiques, il y a une volonté de marchandiser la santé afin de livrer nos pathologies à la concurrence "libre et non-faussée" et ce seront les mêmes qui nous contaminent qui investiront pour nous "guérie". Des voix et des rapports se sont élevées contre cette orientation qui détruit sans ouverture de voie de salut. L'expérience de terrain démontrent le non-sens et le danger que nous fait courir cette politique. Pourtant, et sous l'égide du colonialisme néolibéral de l'Union Européenne, la France est contrainte à la rigueur, à plus forte raison la Guadeloupe. Tous les pays qui ont récusé la rigueur sont en train d'émerger, ce qui prouve que la rigueur ne sert qu'à cacher l'enrichissement d'une minorité qui part s'installer dans des paradis fiscaux. La rigueur sert aussi à asservir les travailleurs et le peuple par l'endettement (aussi bien privé que publique).
LA GESTION DE LA CRISE PAR LES AUTORITES, APRES TROIS SEMAINES.
La FSAS-CGTG, à nouveau, interpellé le ministère de la santé (La nouvelle ministre en titre), dès le 04 Septembre 2017 après le passage d'Irma, où nous réaffirmions que " L'incendie du 28 Novembre vient étayer notre analyse qui, sommes toutes, demeure pragmatique quant aux expériences du passé qui nous ont démontré que si l'ile n'est pas grande, elle souffre de moyens de déplacements d'un point à un autre, en tout cas sur terre puisque rien ne semble avoir été convenu par air ou terre alors que cela est possible (existence de ports et aérodromes conséquents)..". Mais dès le 29 Novembre 2017, nous nous fendions d'un communiqué de presse pour mettre en évidence le fait que le maintien des maternités du CHBT et de la Polyclinique devenaient d'une utilité publique absolue en pareil circonstance de crise. Mais nous pourrions aller plus loin et nous interroger sur le non-recours au Centre Hospitalier de Marie-Galante alors même que, pour justifier de la fermeture de plusieurs de ses services, on nous avait certifié que l'usage d'hélicoptères auraient fait l'affaire.
Nos camarades du Syndicat CGTG - CHU interpellaient, de leur coté et estimant que le CHU allait au-devant de graves difficultés financières, la Ministre de la santé en visite de crise en lui demandant :
- Le Gel de la T2A
- La simplification des procédures administratives après la clôture des appels d’offre pour la reconstruction du nouveau CHU.
- Revoir à la hausse les effectifs médicaux afin de pallier au manque de médecins dans des secteurs en souffrance (anesthésistes, néphrologues…)
- L’application de la réglementation en matière de recrutement.
La FSAS-CGTG ne se prononce pas contre l'ESCRIM mais pour que les dispositions soient prises pour que le provisoire ne devienne pas durable. De toutes les façons, le coût d'utilisation de l'ESCRIM vas obérer mécaniquement le budget du ministère de la santé... Ce qui laisse à penser que les autorités sanitaires sont dans la diligence et explique le retour précipité de certains services. La CGTG-CHU s'est prononcé favorablement pour le retour progressif sous le contrôle du CHSCT et de la commission Départementale de sécurité mais avec des réserves sur l'ambiance olfactive qui règne encore et les risques de réactions allergisantes. Le CHU de Guadeloupe doit reprendre ses activités mais pas à n'importe quel prix, c'est l'occasion de remettre tout à plat et de réviser les prétentions et visions comptables.
LE RETOUR DES SERVICES AU SEIN DU C.H.U. ET LA PRETENDUE ZIZANIE ADMINISTRATIVE.
En tout état de cause, la décision de retour ne semble pas être le seul fait du Directeur Général du CHU mais aussi de l'ARS, si ce n'est du Ministère, car l'Agence Régional de Santé est une structure quasi préfectorale en terme sanitaire. Il n'y a rien d'étonnant à ce que les décisions du Directeur du CHU soit couvertes en dépit de l'avis du Préfet de Région. La CGTG-CHU a écrit au Préfet, dès le 13 Décembre 2017, pour lui signifier son opposition au réinvestissement de la tour nord sans l'accord de la Commission Départementale de Sécurité et l'autorisation expresse du Préfet en personne, seul chargé de la sécurité civile. La FSAS-CGTG demeure circonspecte sur la précipitation de la Direction Générale du C.H.U. tout en reconnaissant la pénibilité, même pour un temps, du transport des agents dès 05 heures du matin jusqu'à tard dans la nuit. Notre confédération s'est aussi prononcée, par voie d'un communiqué de presse, sur le danger de cette précipitation.
Cette apparente zizanie administrative n'est que l'expression de l'explosion des services publiques "horizontales" telles que nous connaissions depuis la sortie de la dernière guerre. Nous avons assisté à la même zizanie lors du passage de Maria où le Préfet demandait à la population de rester confinée alors que les "acteurs économiques", y compris les Centres Hospitaliers, exigeaient que leurs salariés reprennent leur poste.
LES CONSEQUENCES DE LA CRISE SUR LE TERRAIN.
- Au CHU : Une désorganisation de la vie de famille des agents, une amplitude de travail plus lourde (en comptant le transport A-R en bus), un début de déprimes chez des agents fragilisés, une problématique récurrente de cultures professionnelles différentes...
- A la Polyclinique : Des difficultés entre personnels arrivants et accueillants, une charge de travail importante et une pénibilité conséquente et avérée, l'absence des cadres du CHU pour organiser les équipes du CHU, l'avenir de la maternité toujours compromise en dépit de la mise à disposition de locaux pour la maternité du CHU ...
- Aux Eaux-Claires : Les mêmes difficultés qu'à la Polyclinique avec en plus le transfert d'un service vers l'espérance pour libérer de la place pour le CHU (25 lits) mais pas de clause de mobilité pour le personnel... prévu pour Janvier 2018, sans concertation avec les instances du personnel. Il semble qu'il s'agisse d'une affaire de gros sous.
- A l'EHPAD du Domaine de Choisy : 20 lits de SSR suspendus pour accueillir la gastro-entérologie du CHU.
- Au C.H.B.T. : Le service cardiologie, que l'ARS veut élimer, et la maternité, que l'ARS veut déclasser, sont d'une utilité publique indéniable.
- Au C.H.C.B.E. : Un Hôpital que l'on a failli abandonner et qui fait montre d'un grand secours en accueillant une cinquantaine de lits de médecines... Malgré les fuites d'eau qui convainquait plus d'un à refuser d'y entrer.
- Au C.H. de Sainte-Marie (Marie-Galante) : R.A.S., un Hôpital flambant neuf mais sacrifié au nom de la mutualisation néolibérale. Ce C.H. aurait pu servir de base de repli sanitaire mais que nenni car il ne faut pas dédire la technocratie sanitaire.
- Au C.H. Maurice Selbone (Bouillante) : Un C.H. situé sur la zone la plus sécure du territoire - possédant une hélistation - mais mal exploité puisque qu'il n'a reçu aucun patient alors qu'il a des chambres vides en travaux éternels (pour cause d'enveloppes).
- Au C.H.G.R. de Palais-Royal : Structure neuve qui doit accueillir l'ancien CHGR du Raizet et une quarantaine de lits de SSR supervisés par le CHU. La commission de sécurité s'est réunie en urgence et nous craignons qu'un plan foireux ne soit en train d'être manigancé, avec la complicité passive de plus d'un, pour en profiter et permettre un investissement du dépassant le SSR. Si nos inquiétudes sont avérées, cela signifierait que nous avions déjà vu juste dans la Direction commune entre le CHU et le CHGR, porte ouverte vers la fusion et le désengagement - entier ou partiel - de l'Etat dans le financement du nouveau CHU.
- C.H.U. Martinique : 40 patients (enfants et cardiologie lourdes) dont deux décès. Quatre professionnels de Guadeloupe ont "renforcé" ceux du CHUM qui étaient déjà en sous-effectifs, le CHSCT s'est réuni en urgence pour signifier l'épuisement du personnel.
LE PROJET DE DIRECTION-COMMUNE ENTRE LE C.H.U. ET LE C.H.G.R. DANS LA LOGIQUE DE LA LOI "SANTE" SANS TIRER LES LEÇONS DE CET INCENDIE.
Nous avons entendu, sur une radio locale, des prétendus défenseurs de la santé Guadeloupéenne évoquer cette possibilité pour, déjà, répondre à la crise suite à l'incendie. Il faut dire que le C.H.U. aura une quarantaine de lits de SSR au sein du nouveau CHGR Direction commune ou pas. La FSAS-CGTG rappelle qu'elle s'est prononcé contre cette Direction commune (Motion Fédérale du 25 Avril 2016, Tract de Mai 2016 et Tract de Novembre 2017) et qu'il est temps pour les autorités sanitaires de prendre les mesures qui s'imposent pour une politique de santé publique efficiente et adaptée aux "Iles de Guadeloupe". Le secteur gérontologique et gériatrique doit exister de par les projections du vieillissement de la population et des problématiques attenantes. Un Centre Hospitalier dédié à ce secteur est nécessaire en lien avec, bien-entendu, le CHU mais aussi le CHCBE, le CH de Marie-Galante et le CHLDB. La FSAS-CGTG s'est battu pour la construction de ce nouveau CHGR tout comme elle s'était battu, dès le début des années 2000, pour la construction d'un nouveau CHU.
LE PROCHAIN PLAN RÉGIONAL DE SANTÉ TOUJOURS SOUS L'EMPIRE DE LA LOGIQUE COMPTABLE.
Le nouveau PRS à venir est en discussion, des ateliers de travail sont en cours mais le discours des autorités demeure toujours dans la logique comptable : "Dans la limite des enveloppes consacrées", formule pour signifier si toutes les demandes sont recevables elles ne sont pas finançables. Cet incendie fait la démonstration que l'application d'une politique sanitaire monolithique, dans un pays archipélagique et supportant des risques majeurs, ne peut tenir. Il faut revoir la prise en charge en lui insufflant la réalité de terrain et financer en conséquence un PRS adapté dans l'intérêt des malades et des professionnels.
L'articulation administrative n'est plus ce qu'elle était car ce qui compte de nos jours, et c'était bien là le but de la loi HPST, c'est d'autonomiser la décision sanitaire pour mieux lui permettre de rentrer dans le monde entrepreneuriale. Mais le projet de libéralisation économique de la santé en Guadeloupe a un problème de taille : les risques majeurs (séismes - volcanisme - ouragans...) et le caractère archipélagique du territoire. L'incendie du CHU est venu nous le rappeler et la construction du nouveau CHU sur un espace voué à la submersion (choix technocratique), d'ici une trentaine d'années, nous le rappellera à nouveau...
La réalité est aussi dans la culture professionnelle qui diffère entre la notion de service publique et celle de service marchande. Il n'est pas question, pour la FSAS-CGTG, de comparer les travailleurs du publique aux travailleurs du privé, et la culture professionnelle divergente ne doit pas conduire à des conclusions hâtives en faveur de thèses donnant raison aux politiques de déconstruction de l'action publique. Que la Clinique marchande fasse ce qu'elle sait faire et que la santé publique agisse comme elle sait aussi le faire.
Dans le dernier numéro du Progrès social, le Directeur Général de l'ARS propose, sans sourcilier, que "la santé soit la grande cause Régionale pour l'année 2018", à la FSAS-CGTG nous prenons acte et lui disons "chiche" mais pas sous le couvert des enveloppes contraintes nous conduisant au mur, comme c'est le cas de nos jours !
20 Décembre 2017,
FSAS-CGTG