160 milliards d’euros. Chaque année. Voici le coût de l’externalisation des missions de service public. Le coût de l’idéologie néolibérale de privatisation du monde. De l’entêtement dogmatique de la macronie, de la privatisation en marche de nos services publics. C’est ce que nous révèle une note de 14 pages intitulée «160 Md€ d’externalisation par an : comment la puissance publique sape sa capacité d’agir», publiée ce vendredi 30 avril 2021 par le tout jeune collectif Nos services publics, constitué d’une centaine de hauts fonctionnaires et d’agents publics.
Ce scandale ne fera pas les grands titres, il fera moins causer que l’«islamogauchisme» imaginaire ou que les réunions non mixtes qui menaceraient la République, il a pourtant des conséquences dévastatrices. L’externalisation, le fait de confier à un acteur privé la réalisation de tout ou partie de l’action publique, représente aujourd’hui 160 milliards d’euros soit le quart du budget de l’État ! Le plus cocasse étant que cette externalisation se fait au nom de… l’austérité budgétaire.
En compensant la destruction des emplois dans nos services publics par le recours à des prestataires privés, la puissance publique perd en effet (beaucoup) d’argent. Le coût du recours pour l’État à un consultant spécialisé peut ainsi s’élever à 1 500€ HT par jour, nous révèle la note. Bien plus onéreux que de rémunérer un fonctionnaire travaillant et suivant ses dossiers sur le long terme. En résumé : plutôt que de diminuer le coût du service tout en maintenant sa qualité… on en réduit la qualité tout en dégradant les finances publiques. Champion sur toute la ligne.
Cette première note du collectif Nos services publics détaille ce chiffre de 160 milliards d’euros dilapidés chaque année. Les délégations de service public, le plus souvent sous la forme de concessions, représentent 120 milliards d’euros selon le ministère de l’économie et des finances. Il convient, selon le collectif, d’ajouter à ce montant au moins 43 milliards d’euros de marchés de services conclus par les opérateurs publics, c’est à dire de marchés de prestations. Ces 43 milliards sont dépensés pour un tiers par l’État et les hôpitaux (14 milliards), pour un tiers par les collectivités territoriales (13 milliards) et pour le dernier tiers par les entreprises publiques et opérateurs de réseau (16 milliards).
Un scandale passé sous silence par les médias mainstream. Cette idéologie de démantèlement du service public au profit du privé gangrène pourtant nos administrations et nos gouvernements depuis 30 ans. La centaine de hauts fonctionnaires et d’agents publics issus de divers ministères et administrations qui constitue ce nouveau collectif a le mérite de livrer une charge argumentée et bienvenue démontant l’idée largement répandue selon laquelle privatiser reviendrait à réduire les dépenses publiques. Non, c’est même le contraire : la privatisation en marche est une gabegie financière pour la puissance public. Les insoumis proposent à l’inverse la garantie d’emploi et l’État employeur en dernier ressort pour créer des centaines de milliers d’emplois publics pour entamer la bifurcation écologique et sociale de notre économie.
Par Pierre Joigne In l'Insoumission, publié le 03 Mai 2021